MARENNES ET SES TEMPLES
- 1558 : Arrivée à Marennes du premier pasteur, Charles de Clermont dit « La Fontaine », envoyé par Calvin. Le culte se célébrant alors « audit bourg de Marennes en la salle de la dame comtesse du lieu ».
- 1579 : Proposition pour les Réformés d'établir un temple au Lindron.
- 1600 : Achat d'un terrain pour le futur temple. « qui sera fort beau et fort grand ».
- 1601 : Construction d'un temple à Saint-Jean d'Angle, Saint-Just, Moëze, Soubise. A cette époque la religion catholique est à peine connue dans la région.
- 1665 : Pression du clergé et parution de nombreux édits contre les protestants.
- 1678 : Fermeture des écoles protestantes de Marennes. Les armes royales et celles des seigneurs de Marennes sont gravées sur les portes du temple.
- 1681 : (le10 avril) : Ces armes doivent être démolies sur ordre du Procureur du Roi et des jésuites Héraud et Carrière. Le pasteur Loquet et les anciens du consistoire, Dubois, Aubin et Despalus, font reculer le juge inique et les deux jésuites.
- 1684 : (le 12 mai) : Joseph André, archer de la marine, signifie à Jean Loquet d'avoir à enlever les armes.
- 1684 : (février) : Les deux pasteurs de Marennes, Loquet et Boisbeleau sont conduits dans les cachots de la Réole.
- 1684 : (18 août) : Ils sont condamnés à 12 livres d'amende et interdits de leurs fonctions dans le lieu et juridiction de Marennes. Le consistoire est supprimé, le temple doit être démoli et rasé « jusqu'aux fondements », à sa place sera élevée une croix.
- 1684 : (2 novembre) : Devant plusieurs milliers de personnes venant de toutes les Îles de Saintonge, sur ordre d'Arnoult, intendant de Rochefort, le temple est démoli par une bande de mercenaires qui se livrent à mille moqueries. Il faut deux jours pour abattre le temple de Marennes. Les planches rompues et le bois sont vendus pour la somme de 266 livres. Quant à la cloche, De Ris, démolisseur, la fait déposer chez lui; elle pèse 2 quintaux et demi. Plus tard, en février, elle est attribuée au couvent des capucins.
Officiellement, le protestantisme a cessé d'exister à Marennes. Néanmoins, c’est à Marennes que Fénelon commencera en 1686, sa mission de conversion non-violente et avec aussi peu de succès que les dragons.
- 1685 : (18 octobre) Louis XIV signe la révocation de l'édit de Nantes, un an après la destruction du temple de Marennes.
Ce temple construit avant l'édit de Nantes (1598) était le plus important de la Saintonge protestante. Il fut le témoin de 300 baptêmes par an dont 511 en 1634. (A Saintes, la moyenne n'atteignait pas 70).
A la tête de la population protestante, on trouvait les comtes de Marennes de la puissante famille De Pons. Toute une bourgeoisie cultivée d'avocats et d’officiers de marine était protestante.
Après la destruction du temple, on fut obligé d'aller faire baptiser les enfants à Cozes ou au Douhet, au nord de Saintes.
Le temps du Désert et des Maisons d’oraison.
De la révocation en 1685 aux lois organiques de Napoléon en 1802, la construction d’un temple est juridiquement illégale et explicitement interdite. Les prêches ont lieu dans des Assemblées « au Désert », clandestines et périodiques.
Beaucoup plus tard, en 1755, deux protestants de Marennes furent emprisonnés à Brouage pour avoir tenté de reconstruire le temple.
A partir de l’automne 1755, à l’instigation du pasteur Louis Gibert, condamné par contumaces et brûlé en effigie, des granges ou maisons sont aménagées en lieu de culte qu’il appelle : « Maison d’oraison ».
- 1773 : Une maison d'oraison, que tout le monde appelle « temple », est aménagée, avec tribune, bancs, chaire en noyer, et, d'après le pasteur Desmont de Bordeaux, « ... le temple de Marennes, un des plus beaux bourgs de France, est aussi joli, sans aucun ornement d'ostentation, que la plupart de ceux que j'ai vus dans vos villages ». Cet édifice a tellement de succès que même des catholiques viennent au temple et applaudissent au sermon du pasteur !
Arrive la tourmente révolutionnaire, le pasteur Mazauric est emprisonné puis relâché sur l'intervention unanime de la Société populaire, comme irréprochable républicain. Ce pasteur Mazauric est l'un des très rares pasteurs dont le ministère joint la clandestinité (relative) à l'existence officielle sous l'empire.
Le temple actuel.
- Le 9 décembre 1810, il participera à l'inauguration du nouveau temple, ancienne chapelle du couvent des jésuites puis des récollets, vendue comme bien national puis rachetée en 1807 par la dynamique et forte majorité protestante. Il a donc fallu 117 ans pour que les protestants de Marennes prennent une revanche sur leurs persécuteurs de 1684. Quant à la cloche de l'ancien temple, d'après des récits oraux, elle sonnerait aujourd'hui dans le clocher de Bourcefranc, cela reste à vérifier.
- En 1823, l'incendie d'un bâtiment attenant au temple fragilise l'édifice. Il connaît des travaux qui dureront jusquà la nouvelle dédicace du 27 janvier 1861.
- 1836 : Construction du fronton d'entrée du temple.
- Sous le régime des Articles organiques de 1802, la présidence du Consistoire revenait naturellement au pasteur le plus ancien (art. 21). Avec le décret du 26 mars 1852, le président est désormais élu par les membres du consistoire (art. 3). Dans le consistoire de Marennes composé exclusivement de la seule tendance orthodoxe, l’élection se déroule sans difficulté. A Marennes, le pasteur Cambon, alors en difficulté dans son Église, n’est point appelé à présider le consistoire : c’est une personnalité qui apparaît plus modérée, le pasteur de Nieulle, Amer Pelet qui est choisi. Il est régulièrement élu et confirmé par le Ministère de l’Instruction publique et des cultes, dans cette fonction, et cela jusqu’à sa mort en 1891.
- De 1979 à 1981, l'intérieur de ce temple est remodelé. Le culte d’action de grâces du 24 mai 1981 est suivi d’un repas convivial de 249 couverts. La rotonde restaurée est devenue « l’espace bourse aux vêtements » du diaconat ou entraide protestante et son succès ne se démet pas.
- Du 27 novembre au 11 décembre 2010, le Conseil presbytéral des Iles de Saintonge a organisé laquinzaine du bicentenaire de ce temple ouverte et close par un concert et la présence d’une exposition sur la Bible. Il y eut 4 temps forts : d’abord, le culte du 28 novembre au cours duquel le professeur de théologie à Montpellier, Élian Cuvillier, ancien pasteur du lieu, développa le thème de la quinzaine : « pour réveiller votre mémoire » (Romains 15,16), car l’oubli n’efface pas les faits, y compris la venue essentielle du Christ. Ensuite, sur proposition du curé, la célébration œcuménique du 2 décembre : signe de réconciliation, de paix et de joie de voir ce lieu redevenu un lieu de prière ; puis, le 4 décembre, la conférence de l’historien Nicolas Champ qui à partir de sa thèse de doctorat sur Religion et territoire, le cas de la Charente-inférieure, présenta le dynamisme de la minorité protestante de Marennes et Oléron au début du 19e siècle. Enfin, le 9 décembre, la célébration officielle en présence du maire, des élus, du curé et des pasteurs.